Avril 2019

Chers amis membres de la Confraternité,

En méditant un peu sur la conduite des apôtres au moment de la Passion et sur celle qui fut également la leur après la Résurrection, nous pouvons tirer quelques petits enseignements quant au respect humain qui guette même les meilleurs.

Ainsi, nous pouvons voir au moment de la Passion de Notre-Seigneur ses disciples bien-aimés, tout juste ordonnés prêtres (les mêmes qui juraient quelques heures auparavant de lui rester fidèles), abandonner leur Maitre les uns après les autres. Et cela commence au jardin des oliviers avec les trois apôtres préférés qui s'endormant au lieu de veiller et prenant ensuite la fuite pendant l'arrestation. Même si saint Jean, il faut le noter, sera tout de même le lendemain au pied de la croix près de la Vierge fidèle.

Et après la Résurrection ? Nous voyons ces mêmes courageux disciples, bien tristes et surtout enfermés au Cénacle par crainte des Juifs.

Saint Claude de la Colombière écrira sur cet épisode bien significatif :

"Je ne vois rien de toute l'histoire de la Passion qui fut plus capable d'augmenter le scandale des Juifs et de les confirmer dans l'erreur où ils étaient touchant la divinité du Christ, que le silence et la fuite de tant de disciples qui faisaient profession d'avoir un attachement très particulier pour sa personne. Et de toutes les circonstances qui rendirent son supplice si infâme et si douloureux, je ne doute point que celle-ci ne fut la plus honteuse et la plus dure. Cependant, la crainte que ces mêmes disciples témoignent après sa résurrection me parait encore plus lâche que la perfidie qu'ils commirent à sa mort; car si leur foi parut alors chancelante et incertaine, s'ils doutèrent de la divinité de Jésus, ce ne fut qu'après avoir vu ce Dieu dans un état qui pouvait faire douter raisonnablement s'il était homme; et s'ils perdirent enfin toute sorte d'espérance, ce ne fut qu'après que ce même Dieu, qui en était l'unique appui, eut lui-même perdu la vie.

Mais après que la nouvelle vie de Jésus-Christ doit avoir affermi leur foi et réveillé leur espérance; après que la gloire de sa résurrection a entièrement effacé l'ignominie de sa mort, je leur demanderais volontiers quel prétexte ils peuvent avoir pour colorer cette crainte qui les tient enfermés au milieu de Jérusalem et qui leur lie la langue, lorsqu'ils devraient partout publier la victoire de leur Maitre. S'il y avait quelque honte à se déclarer pour un homme mourant et attaché à la croix, y-at-il rien de plus glorieux que de prêcher un Dieu vivant et ressuscité? [...]

Cette honte que nous condamnons dans ces premiers fidèles a passé jusqu'à nous et elle continue de faire de très funestes ravages dans le troupeau de Jésus-Christ."

Et c'est vrai que parfois, nous qui sommes de "bons chrétiens", nous qui croyons et prions, nous pouvons dans le même temps être lâches dans la vie que nous menons et dans le témoignage que nous offrons. Parce qu'il ne fait pas toujours bon se dire chrétien aujourd'hui dans le milieu où nous travaillons par exemple. Disons-le tout simplement, il peut nous arriver de rougir de notre foi comme un enfant de10 ans rougirait d'embrasser sa maman à la porte de l'école à l'idée d'être aperçu par ses camarades.

Et cette lâcheté vis-à-vis de notre Sauveur, lui qui lui n'a pas rougi au moment d'être condamné à mort pour nous, comporte, sans même parler de l'honneur non rendu à Dieu, des conséquences.

Sur nous tout d'abord; puisque si nous rougissons à l'idée de témoigner du Christ devant les hommes, nous le savons, le Christ lui-même rougira alors de nous devant son Père comme il l'a affirmé à ses disciples (Lc, 12, 8-9). Et cette lâcheté peut avoir aussi des conséquences graves sur les âmes qui nous entourent par le mauvais exemple qui est le nôtre.

Et pourtant, les apôtres aimaient profondément leur maitre qu'ils avaient accompagné pendant trois années et dont ils avaient tant reçu. Au point qu'ils se disaient prêts à mourir avec lui (Jn, 11, 16). Un peu comme nous peut-être.

Pour que le changement d'attitude chez les apôtres soit décisif et qu'ils soient capables de suivre le Christ et de l'annoncer sans crainte, il faudra la descente du Saint-Esprit à la Pentecôte.

Cela veut bien dire que sans la grâce, c'est-à-dire sans l'aide de Dieu et sans en particulier la force du Saint-Esprit, nous ne pourrons bien évidement pas faire mieux que les premiers témoins de la mort et de la résurrection du Christ. Soyons-en humblement persuadés. Seuls, nous ne valons pas grand-chose. "Seigneur, méfiez-vous de Philippe" aimait à dire St Philippe Néri, "il pourrait bien vous trahir".

Que l'exemple malheureux des apôtres (qui se sont bien rattrapés par la suite) soit pour nous une belle leçon d'humilité. Et que ce même exemple nous invite surtout à nous tourner vers Dieu et à lui demander la grâce d'être fidèles et forts.

Dans un peu plus de deux mois, à l'anniversaire de cette fameuse Pentecôte qui transforma les disciples, aura lieu notre traditionnel pèlerinage de Chartres. Beaucoup de prêtres et de séminaristes de notre petite Fraternité s'y rendront. Puissent-ils accompagnés par vos prières y obtenir beaucoup de grâces, et en particulier celle de la fidélité. Car les temps sont durs, et l'Eglise a besoin de témoins fidèles.

Que ce pèlerinage qui nous est si cher et que nous pouvons préparer par la prière soit une belle occasion de conversion pour chacun d'entre nous. A commencer par moi. Beaucoup d'âmes ont renoués avec une pratique fervente ou ont appris à connaître la liturgie traditionnelle sur cette route. Prions pour qu'il en soit encore de même dans quelques semaines.

Dans cette période pour le moins compliquée que nous traversons, ce pèlerinage apparait comme une oeuvre "protégée" du ciel et "porteur" de nombreuses grâces. Avec un peu d'avance donc: tous à Chartres, au moins par la prière pour le grand succès de ce beau pèlerinage.

La Messe mensuelle à vos intentions sera célébrée le matin de Pâques.

En vous souhaitant par avance de saintes Fêtes de Pâques et en vous remerciant comme toujours du fond du coeur pour vos prières.

 

 

Nouvelles de la Fraternité

Si vous n'avez jamais fait de retraite selon la méthode de saint Ignace, il est encore temps de vous inscrire à l'une des retraites prêchées cette année. Là aussi nous avons beaucoup à recevoir.

La samedi 4 mai prochain auront lieu des Vêpres solennelles à quatre chapiers à Bourges à l'église Notre-Dame à 18h. Le lendemain 5 mai à 10h30 dans cette même église (dimanche du Bon Pasteur) l'abbé Ribeton, Recteur du séminaire saint-Pierre, chantera la messe solennelle en présence des séminaristes français de Wigratzbad. Il sera accompagné de l'abbé Cras tandis que l'abbé Renard célèbrera et prêchera le même jour à Chateauroux.

Le 25 mai auront lieu à Wigratzbad les ordinations diaconales conferées cette année par Monseigneur Marc Aillet. Trois des sept candidats sont français. Le 31 mai sera ordonné prêtre pour la Fraternité l'abbé Luc Poirier (Canadien) à la cathédrale d'Ottawa des mains de Mgr Prendergrast.

 

La Fraternité en République Tchèque, par Monsieur l'abbé Gilbride, sous-diacre néo-zélandais de la FSSP

Après la Chine, la République Tchèque est le pays au monde avec le plus grand pourcentage d’athées ; c’est dans ce même pays de saint Wenceslas pu de saint Jean Népomucène que la Fraternité s’efforce depuis déjà un certain temps de s’implanter.

Trois prêtres Tchèques appartiennent  à la FSSP et deux séminaristes du même pays se forment en vue du sacerdoce dans nos maisons.

À tour de rôle, deux prêtres se relaient dans un apostolat qui nous a été confié et visitent des chapelles liées à la Messe traditionnelle dans quatre diocèses.

Alors qu’il n’était encore que séminariste, l’abbé Jakub Zentner (le premier prêtre Tchèque ordonné pour la FSSP) préparait le terrain d’un futur apostolat en organisant des camps de jeunes et d’autres activités en lien avec les communautés traditionnelles Tchèques.

À la suite de son ordination en 2016, il visita tous les mois la communauté tridentine de Prague ainsi que celle de Litoměřice au nord de la Bohème.

Durant l’été 2016, des confirmations selon le rite ancien furent administrées au monastère Cistercien de Vyšší Brod, communauté monastique célébrant exclusivement la forme extraordinaire du rite romain. Plusieurs dizaines de fidèles étaient présents pour cette cérémonie où l’officiant, Monseigneur Athanasius Schneider prêcha en Tchèque.

L’Evêque du diocèse de České Budějovice (Budweis) Monseigneur Vlastimil Kročil était un peu soucieux au départ. Avec le temps et surtout la connaissance de ce groupe de fidèles attachés à la forme extraordinaire, son attitude changea. Dans un pays à la recherche de chrétiens actifs, ces fidèles furent un heureux présage.  Et ce même Evêque finit par inviter la Fraternité dans son diocèse et depuis l’automne dernier, nous œuvrons dans ce diocèse du Sud de la Bohème.

Nous avons reçu la charge de la Chapelle de Lorette dans le village de Římov, à 14km au sud de České

Budějovice (Budweis). C’est une église conséquente, liée à des apparitions reconnues par l’Eglise du XVIIème siècle.

En 1626 Notre-Seigneur et la Sainte Vierge apparurent en même temps à deux prêtres de la région, leur demandant de bâtir un chemin de croix semblable à celui de Jérusalem.

Chacun des prêtres apprit rapidement que l’autre avait bénéficié de la même apparition et l’un d’entre eux se rendit à Jérusalem prendre les mesures du jardin des Oliviers, de la cour du Sanhedrin, du palais de Pilate etc.

Dans le village de Římov et les fermes environnantes furent érigées 25 stations marquant chacune des étapes significatives de la Passion du Seigneur. Ce chemin de croix fait 7 km. Le chemin de croix de Jérusalem n’a pas été toujours établi selon le même schéma au cours des siècles ; il fut un temps où il possédait 25 stations. Quelques années plus tard, les musulmans les détruisirent mais la réplique avait déjà été construite en Sud-Bohème.

                Prague fut une fois – il y a bien longtemps – une des capitales du saint Empire et le Royaume de Bohème était un bastion de la foi catholique. Comment la Bohème en arriva à devenir une société athée aujourd’hui ? Les racines de la crise s’étendent sur plusieurs siècles mais les causes les plus prochaines sont principalement  à trouver dans les deux derniers siècles.

Tout d’abord, en 1782, l’Empereur Joseph II d’Autriche, influencé par le rationalisme supprima les Institutions religieuses jugées inutiles. La perte de ses communautés contemplatives fut énorme pour l’Église. Le deuxième grand assaut contre l’Église fut le nationalisme sans foi qui vit le jour pendant la révolution de 1848. Ce mouvement était opposé à la monarchie des Habsbourg et comme l’Église était un pilier majeur de cet Empire, il se fit anti-catholique. La monarchie fut abolie après la première guerre mondiale et en 1920, l’Église « nationale » Tchécoslovaque fut établie et reçut malheureusement en son sein plus d’un million de catholiques Tchèques. L’identité nationale prit le pas sur l’identité religieuse.

En 1938, avec l’arrivée des Nazis allemands survint une nouvelle persécution. La vie publique de l’Église fut restreinte et de nombreux prêtres furent envoyés en camp de concentration.

Après la seconde guerre mondiale, deux nouveaux  facteurs contribuèrent à l’affaiblissement de l’Église. Tout d’abord, trois millions d’Allemands, la plupart catholiques, furent expulsés. Leurs maisons et villages furent pris par des Tchèques sans connexion religieuse réelle et sans clergé pour les accompagner.

Puis, en 1950, les dirigeants communistes opprimèrent brutalement l’Église ; en une nuit, tous les Évêques et les Pères abbés furent arrêtés ; de très nombreux prêtres furent exécutés ou envoyés dans les mines d’uranium et tous les monastères furent fermés. La vie religieuse fut réduite au strict minimum

En 1968, les gouvernants Tchécoslovaques réalisèrent que le communisme soviétique était un échec et commencèrent des réformes économiques et sociales incluant la liberté religieuse. L’Union Soviétique et les Pays du Pacte de Varsovie craignant que ce pays ne se tourne vers l’Occident décidèrent de l’envahir. Sous ce nouveau régime,  la pratique religieuse était considérée comme un sentiment « anti-communiste ». Le communisme réussit à détruire presqu’entièrement la vie chrétienne.

Quand l’Union Soviétique se désintégra au début des années 90, l’Église en République Tchèque put à nouveau respirer, mais 30 années plus tard, nous devons constater qu’elle souffre toujours de l’amnésie spirituelle apportée par 70 années de gouvernements socialiste, nazi et communiste.

Malgré les difficultés existantes, il existe quelques signes de renaissance spirituelle  dans le pays, notre apostolat se voulant devenir l’un de ceux-ci. Parmi les fruits spirituels des deux dernières années, nous devons noter que plusieurs adultes ont été baptisés par nos prêtres. Beaucoup de travail reste bien sûr à faire, mais nous devons rendre grâces pour l’œuvre commencée et prier pour qu’elle se poursuive et puisse prospérer.

Notre-Dame de Římov, priez pour nous !

Site Tchèque de la FSSP